Et maintenant la pratique !
Notre sténopé est fin prêt et s’impatiente pour manger de la pellicule.
Dans ce dernier chapitre, vous trouverez toutes les informations nécessaires pour bien utiliser et régler votre appareil.
Avant toute chose, quelques éléments de base :
Le choix du film
L’appareil que nous avons fabriqué, utilise du plan-film au format 4 x 5 inches, soit environ 10 x 12,5 cm.
Ce film doit être chargé dans des châssis double face, recevant chacun 2 plan-films. Cette opération s’effectue dans le noir complet.
Pour le chargement de ces châssis, je vous renvoie à mon blog, où un tutoriel illustré vous explique pas à pas la marche à suivre :
Nous avons choisi ici des châssis du type « Fidelity », standardisés, que l’on trouve facilement d’occasion sur des sites comme eBay, pour un prix entre 20 et 50 euros.
Dans le cadre de l’exercice prévu pour le club, un châssis, déjà chargé avec deux plan-films, vous sera prêté le temps nécessaire de réaliser vos clichés.
Il contient du film Fomapan noir et blanc, d’une sensibilité de 200 asa, qui devrait convenir à la plupart des situations de prise de vue que nous pouvons rencontrer.
Si vous souhaitez continuer à pratiquer le sténopé par la suite, il vous faudra acquérir vos propres châssis, car je dois récupérer ceux donnés en prêt assez rapidement, étant donné qu’ils me servent dans mes autres appareils grand format.
Le calcul du diaphragme
Souvenez-vous de la formule que nous avons découverte dans la partie 4 de cette série d’articles :
On divise la profondeur par le diamètre de l’ouverture pour obtenir le chiffre correspondant du diaphragme
Dans notre cas, avec une distance de 58mm entre notre sténopé et la surface du film d’une part, et un trou mesurant 0,35mm, nous obtenons un diaphragme de f :166
Le calcul du temps de pose
La valeur trouvée pour le diaphragme, nous permettra de déterminer le temps de pose, en fonction des conditions de luminosité que nous rencontrerons lors de la prise de vue.
En effet : la sensibilité du film étant fixe (ici 200 asa), ainsi que le diaphragme (f :166), il ne nous reste que la durée d’exposition sur laquelle nous pouvons agir, pour obtenir un cliché parfaitement exposé.
Il y a encore un autre élément que nous devons prendre en compte, pour déterminer le temps de pose.
Les émulsions de film réagissent de façon différente à l’exposition à la lumière, selon que cette durée est plus ou moins longue. C’est ce qui s’appelle le « facteur de réciprocité »
Expliquer ce phénomène sort du cadre de cet article. Retenons simplement que cela ne joue pas pour des durées d’exposition de moins d’une seconde et que, au-delà de 1 seconde, il faudra graduellement augmenter la durée d’exposition, selon un facteur qui varie selon les caractéristiques de chaque film. Les fabricants fournissent ce facteur de correction dans leur notice technique.
C’est tout ? Oui et non… car cela se complique un peu, par le fait qu’il n’existe aucun instrument de mesure, capable de mesurer la luminosité à un diaphragme de f :166 !!!
Mais pas de panique ? Il faudra simplement faire une mesure à une valeur de diaphragme qui entre dans les limites d’un appareil classique, soit une cellule incorporée dans une caméra, soit une cellule externe, et ensuite faire la conversion vers notre valeur f :166.
Dans la pratique, on mesure à f :22
Et pour vous faciliter la tâche, je vous ai préparé un tableau qui tient compte :
- De la conversion entre f :22 et f :166
- Du facteur de réciprocité du film Fomapan 200, que nous utiliserons.

Ce tableau a été généré par l’excellent petit programme « Pinhole Designer » écrit par David Balihar, que je remercie ici pour son excellent travail.
Pour ceux d’entre vous qui souhaitent utiliser un sténopé d’un autre diamètre, ou un appareil avec une distance différente entre le trou et le film, ce programme leur permettra de réaliser facilement ce même tableau, adapté à leur configuration.
Le programme peut être téléchargé ici
https://www.pinhole.cz/en/pinholedesigner/
Récapitulons : Je fais ma mesure à f :22 en ayant réglé ma cellule à 200 asa
- Je trouve une valeur de : 1/125 sec. : je dois exposer pendant ½ sec.
- Je trouve une valeur de : 1/15 sec. : je dois exposer pendant 28 sec.
- Je trouve une valeur de : 1/2 sec. : je dois exposer pendant 5 Minutes !!!
Vous voyez que dans des conditions d’éclairage médiocre, les temps de pose sont vraiment très longs avec un sténopé.
Nous disposons maintenant de tous les éléments pour nous rendre sur le terrain.
A partir d’ici, cela devient (presque) de la photographie classique.
On travaille sur pied, étant donné les longs temps de pose.
- Choix du sujet : Tout est possible, même le portrait, à condition que le modèle soit capable de rester immobile pendant de longues secondes (minutes ???)

Mais souvenons-nous que cet appareil est l’équivalent d’un très grand angle – de l’ordre de 110 degrés – et que si vous voulez mettre en valeur un sujet à l’avant plan, vous devrez vous approcher très près de celui-ci.
- Profondeur de champ : Ne vous en souciez pas ! Elle est présente de 0 à l’infini, étant donné l’absence de lentilles.
Cadrage : pas de viseur, donc cadrage « au jugé ». C’est ici que cela devient créatif ?
Mais si vous voulez tout de même obtenir un certain degré d’exactitude, je vous conseille de fabriquer une petite équerre en carton représentant un angle de 110 degrés.

En mettant celui-ci sur le dessus de l’appareil, avec la pointe à hauteur du milieu du châssis, et en regardant le long des lignes, vous aurez une idée assez fiable de ce que vous allez saisir sur votre pellicule.
- Mise en place du châssis : Insérez le châssis derrière le cadre feutré de l’appareil et immobilisez-le, en mettant la baguette ronde entre le châssis et les deux baguettes de maintien.
Prenez soin de bien le caler – sans excès toutefois – en veillant qu’il reste bien enfoncé jusqu’au fond de l’appareil.

La prise de vue :
- Faites votre mesure de lumière et déterminez le temps correspondant à l’aide de votre tableau.
- Retirez le volet du châssis, après vous avoir assuré que votre obturateur est bien fermé.
Petite précision : le châssis possède deux volets et il faut bien entendu ne retirer que celui situé à l’avant du châssis, sous peine de voiler irrémédiablement le deuxième plan film !
Remarquez que le volet est positionné avec sa partie supérieure de couleur blanche / argentée vers le devant de l’appareil. Cela signifie que la pellicule est encore vierge de ce côté.

Assurez-vous également que le châssis reste bien calé contre le fond de l’appareil.
- Prenez votre cliché.
Décollez l’adhésif de l’obturateur et maintenez-le ouvert pendant toute la durée de l’exposition, tout en veillant à ne pas faire bouger l’appareil. Une montre à trotteuse peut-être très utile ici.

- Refermez l’obturateur.

- Remettez le volet en place en le retournant, avec la partie qui dépasse du châssis montrant son côté noir vers le devant de l’appareil.
Vous saurez ainsi que la pellicule de ce côté est exposée, ce qui vous évitera une double exposition fâcheuse !

Voilà ! votre première photo est faite.
Retournez votre châssis, mettez-vous à la recherche d’un deuxième sujet, et recommencez l’opération.

Après avoir réalisé vos deux clichés, enlevez le châssis, stockez-le à l’abri de la lumière.
N’ouvrez surtout pas les volets sous peine de voiler vos films.
Nous développerons ensuite les films au labo du club.
A vous de jouer maintenant !
Merci au comité de lecture pour les corrections apportées.
One response
[…] Dans un dernier chapitre, je vous détaillerai comment utiliser votre appareil. […]